L’enfant qui ne demandait rien

A quel âge les enfants commencent-ils à demander qu’on leur achète des trucs et des machins?

L’un des nombreux plaisirs égoïstes qu’on a avec les enfants en bas-âge, c’est qu’il s’émerveillent pour des broutilles, et qu’ils manifestent leur émerveillement d’un plaisir tellement énorme, spontané  et extraverti que cela procure un plaisir formidable à ceux autour, parents en premier. Yukiko et moi sommes toujours à nous retenir de lui acheter des milliards de choses pour générer ce plaisir. Et pour le moment, quand il demande quelque chose, on lui achète sans trop réfléchir (bon, la peluche  Totoro à 1000 €, on lui a pas achetée, c’est vrai, mais en fait il voulait surtout la tenir dans ses bras). En gros, quand il demande quelque chose, c’est de la bouffe, et encore c’est très rare. Mais on peut bien passer chez Toys R Us, avec des milliards de trucs qui ont l’air super sympas et super fun, il ne demande rien (Ah si, il avait demandé une voiture, et on lui a offert pour son anniversaire). Alors je me demande, quand est-ce que la frénésie va commencer…

Je ne me rappelle bien que d’une seule fois en dehors de la voiture où il a voulu ramener quelque chose d’un rayon jouet; on y était allé pour acheter des jouets de plage (saut, rateau et autres trucs dans le genre), et après avoir trouvé ce qui nous intéressait, je suis allé seul en caisse (longue file d’attente, on était un samedi). Pendant que j’étais en caisse, Yukiko est venue me rejoindre seule en disant “Ryu veut acheter un set de voitures de service public”.

Ryu adore les camions de service public: pompiers, ambulance, bennes à ordures, police, etc. Il connait presque tous leurs noms (en japonais, snif). Oui il connait bien les bennes à ordures; quand on se promène dans la rue, il va nous sortir d’un coup “gomishūshūsha”, et Yukiko et moi allons faire tourner nos cous respectifs pour faire un tour d’horizon, et toujours on en voit bien une à l’horizon: il les reconnait bien. Evidemment, il ne sait pas à quoi elles servent, et ne fait pas de différence entre une benne à ordures et une bagnole de police (je ne ferai pas de blague sur cette phrase), dans leurs fonctions concrètes du moins; il reconnait juste les traits physiques caractéristiques de chacun de ces véhicules.

Je reviens à mon histoire dans le magasin. Yukiko était venue me voir seule, sans doute pour préparer le terrain puisque je joue plus souvent qu’elle le rôle de l’ogre pingre qui restreint les dépenses financières. Evidemment je dis oui et demande où est Ryu. Elle me dit qu’il amène le jouet en question en hochant de la tête dans la direction derrière moi. Je regarde derrière, et j’explose de rire: la boite faisait la moitié de la taille de Ryu, et tout en la maintenant à hauteur des yeux, il la ramenait péniblement vers moi, en disant “papa! papa!”, et avec des yeux disant “regarde ce que j’ai trouvé!”. Et il était tellement joyeux… ce genre de moment, ça vous reste gravé en tant que parent.

– Tu veux ces voitures, Ryu?

– Un! (lisez “oune”, le “oui” japonais familier)

– “Oui” ? (je le corrige toujours)

– Ouiii!

Trois ou quatre mois après, il s’amuse toujours avec ces voitures. Ça aussi ça fait plaisir.

A propos du langage, je vais essayer de faire une liste de mots que Ryu privilégie en français plus qu’en japonais. Tout de suite, je pense à: voiture, ours, douche, bébé, tomber, vélo, oui, non.

Et puis il y a les mots qu’il utilise soit en japonais, soit en français, selon son interlocuteur: eau, bus

Sacré minorité pour le français. Je vais y réfléchir, j’ai du en oublier.

One thought on “L’enfant qui ne demandait rien”

  1. Oh ben si la folie d’achat ne commence jamais, c’est mieux ! Il y a des chances que ça commence quand il verra ses petits copains avec des trucs qu’il a pas … Moi je pense que ça avait débuté comme ça 🙂

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