Christophe

La dernière partie de la rétrospective arrive… mais elle est complexe à écrire.

En attendant, je voudrais parler de Christophe G. On était dans la même classe en 4e et 3e, et il avait fait sa seconde et première dans le même lycée que moi, dans une autre classe.

Christophe était une sorte de bouffon, mais très sympathique. Le mot de “bouffon” ici ne se veut pour une fois pas péjoratif. Son visage, son expression, son comportement, sa démarche tout ça faisait que absolument personne ne le prenait au sérieux. Mais il avait un bon fond, c’était facile de parler avec lui et il n’aurait fait de mal à une mouche. Il n’était pas naïf non plus, il faisait des blagues grivoises des fois, de bon sarcasmes à d’autres moments, etc. Je me suis souvent assis à côté de lui, volontairement et sans jamais le regretter, il était cool, quoi. Mais… bon… je le prenais pour un bouffon quand même, mais sympathique, à la différence du reste de la classe qui ne l’appréciait guère.

Un jour alors que nous étions dans la salle de jeux du collège (un pré-fabriqué avec des tables et des jeux de sociétés). Christophe a par mégarde bousculé (et c’est un bien grand mot pour décrire le contact physique qu’il y eut) un gars qui était assis sur une table. Le gars en question était hélas THE caïd du collège.

On pourrait se dire “ouais, collège, tout mignon”, mais non, il n’était pas mignon et il n’était pas loin de devenir pro dans le crime. Drogues, armes. Il avait redoublé 3 fois, il avait 18 ans. A mon avis il n’en était qu’au deal de marijuana et les armes c’était plutôt des armes blanches. Il était toujours entouré de sa cour (ses lieutenants) et non, vraiment, c’était pas quelqu’un à qui il fallait se frotter. Mais Christophe avec sa maladresse habituelle nous avait fait un bullseye sur ce coup.

Notre caïd a explosé de rage et s’est précipité sur Christophe, dans son dos. J’ai eu le temps de lui dire “attention derrière toi!”, il a perdu son sourire et a commencé à se retourner mais trop tard, il s’est pris un violent coup de pied qui l’a projeté à 3 mètres par terre. Il se relève vite en position de défense tandis que l’autre marche vers lui en hurlant qu’il va lui démolir la gueule.

Là, le pion de service crie “ohohoh, vous pouvez pas faire ça ici, sortez!”.

Le caïd sort avec ses lieutenants sans même regarder Christophe mais en hurlant “je vais le démolir, putain de sa race”.

Moi je devais être à 130 de pulsations cardiaques, Christophe à 200. On reste un peu comme des zombies, et le pion nous intime l’ordre de sortir.

Mais sale enculé ce pion. On était DANS le collège bordel, et il envoyait mon pote à l’abattoir. Mais un tel manque de responsabilités, c’est irréel! Je m’en veux à mort de ne pas avoir été lui gueuler dessus à ce connard, j’encaissais vraiment tout à l’époque…

Christophe, c’est peu de dire qu’il était pragmatique, a pris quelques profondes inspirations et a dit “Bon, bah quand faut y aller…”. On est sortis du pre-fab très lentement et… y’avait personne qui l’attendait.

On était là, WTF??

On a regardé au loin, mais non, rien. On a avancé prudemment sur quelques dizaines de mètres, rien de rien… Pas d’attaques ce jour, ni tous les autres jours, le caïd est vraisemblablement passé à autre chose et n’en a plus rien eu à foutre. Christophe a fait quelques blagues (genre “Ah! Il a peur de moi! ahah…”) et fait part de son soulagement. Toujours honnête et franc dans ses remarques.

Interlude 1: Le caïd est mort l’année suivante. Il parait que c’était un accident (de la route). Un caïd qui meurt dans un accident, je trouve ça louche, mais je n’ai jamais entendu de rumeurs sous-entendant autre chose qu’un accident. Je regarde trop la TV.

Quand j’avais revu Christophe au lycée après, je lui avais demandé “Tu sais que xxx (le Caïd) est mort?”

Il avait eu un gloussement et avec un grand sourire m’avait répondu: “Ouais j’avais entendu… pas de bol pour lui, hein?”

Interlude 2: La copine du caïd était dans ma classe de 3e…. Elle aussi avait redoublé 2 fois et elle était… dynamique, agressive, pleine de maquillage et d’accessoires, toisait le reste de la classe et ne m’a je crois pas une seule fois adressé la parole dans l’année. Elle avait “mauvais genre” mais je n’avais rien contre elle, elle m’indifférait en gros…

A la mort de son copain et d’après les rumeurs, c’est allé très très mal pour elle. Je n’ai pas eu les détails, plusieurs sources (concordantes) m’ont dit qu’elle avait “un peu” perdu le contact avec la réalité. D’autres ont même dit qu’elle était devenu complètement folle.

C’était pas de bol pour elle non plus apparemment.

Interlude 3: C’est en arrivant au lycée que j’ai pris la mesure de notre caïd du collège. Le lycée était dans la ville à côté (Rezé, 40,000 habitants, frontière avec Nantes). Les fripouilles de Rezé étaient d’un tout autre niveau. Là c’était drogues dures et flingues. Ils étaient tout le temps pas loin du lycée, mais c’était vraisemblablement une coïncidence; d’abord ils n’étaient pas inscrits au lycée, ensuite ils n’étaient jamais devant les portes du lycée non plus, et enfin je n’ai pas une seule fois entendu parler d’histoires de drogues dures dans le lycée. Juste, leur QG n’était pas loin, c’est tout… (il y avait plein de barres HLM à côté du lycée, ils devaient être dedans…)

Ils faisaient peur, mais je n’ai jamais entendu parler d’une embrouille avec eux. A mon avis, et d’après ce que j’ai pu lire dans les journaux, ils étaient connus des flics et n’avaient surement pas envie de risquer une intervention policière pour des conneries. Donc c’était sans risques pour nous a priori.

Notre caïd du collège faisait finalement gentil à côté. Fin des interludes.

J’ai donc revu Christophe en seconde, il était toujours pareil, marrant. Et il avait une copine….un canon mon neveux…à tomber raide. Et pas une gourde s’il te plait, une fille avec une tête bien pleine. Je suis resté bouche ouverte quelques secondes tellement j’y croyais pas. Eheh, il avait peut-être l’air d’un bouffon pour beaucoup, mais il avait su se faire une telle copine… bravo, mais j’étais (gentiment) jaloux.

Je l’ai revu…me rappelles plus, un ou deux ans plus tard. C’est marrant quand j’y repense, on était dans le même lycée et on ne se croisait jamais…Il doit y avoir des trous dans ma mémoire. Bref, je le rencontre, il était toujours le même, et il avait une nouvelle copine…un canon, encore plus belle que la première (j’aurais pas crû ça possible), tout aussi sympa et intelligente… J’étais encore jaloux mais là c’était moins gentil: “Mais merdeeuuuh ça commence à bien faire là!! Mais comment il fait putain!!”

lol il paraissait rien comme ça, mais il avait de sacrés qualités qu’il exploitait habilement. On trouve vraiment de tout dans le monde.

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