Clients irrascibles

Mais j’ai de ces clients récemment, moi! Des fous furieux! J’en ai jamais eu une telle concentration.

Je reçois une commande de l’étranger comme d’hab. Super urgent comme d’hab. On me contacte par chat pour que je vérifie asap la commande avec le contact local. Bon, ok, très urgent donc. J’envoie un mail hier, toujours pas de réponse aujourd’hui alors j’appelle le client, normal pour une commande urgente (pour ce genre de coup de fil je demande “vous avez bien reçu mon mail? Vous comprenez bien le contenu? Vous pouvez y répondre svp?”). 90% du temps c’est très cordial et produit de bons résultats. Mais alors là!

La fille au bout: Compagnie xxx.
Moi: Bonjour! Je suis Cable de la Compagnie yyy. Mr Tanaka est-il là svp?
Elle: Non.
Moi: Ah… je peux rappeler plus tard, vous savez s’il revient dans la journée?
Elle: Non, il revient pas aujourd’hui.
Moi: Ah. Euh, demain alors?
Elle: Nan mais c’est pour quoi?
Moi: On a reçu un contrat/une commande de l’étranger pour l’installation de nos services de telecommunication pour un de vos sites, je dois vérifier le contenu avec le client local avant de commencer l’implémentation.
Elle: Ah.
Moi: et donc, savez-vous quand il revient, demain par exemple?
Elle: Je suis pas censée connaître son schedule, moi.
Moi: Oo??? oooo–kkkk, j’ai compris, merci, au revoir.
Elle: <Raccroche violamment sans un mot>

Nan mais sans déconner! Ya des gens j’vous jure!

Congés Maladie

Tout le monde le sait, il n’y a pas de congé maladie au Japon.

Non, tout le monde ne le sait pas? Bon alors, tous ceux qui travaillent au Japon le savent.

Mais en fait, c’est pas complètement vrai. Les règles changent d’une compagnie à l’autre. En général, plus la compagnie est grosse, plus les règles sont sympa pour l’employé. Législation zéro dans le domaine, même l’article Wikipedia sur le sujet est terrifiant avec ses 8 lignes.

En général, au Japon, quand on est malade, on utilise ses congés payés. Avec 10 jours par an en début de carrière (et pour beaucoup d’employés, toute la vie), il vaut mieux ne pas tomber malade souvent! Une grippe, et zou! 5 jours en moins. D’autant plus qu’en cas de maladie contagieuse comme la grippe, la boite vous force à ne pas venir, c’est à dire qu’elle vous force à utiliser vos congés payés.

Les gens avec un gros rhume ou n’importe quelle maladie, du moment qu’ils sont capables de tenir debout et de parler, vont travailler. Ils ne foutent rien de la journée, travaillent à 10% de leur capacité dans le pire des cas, mais leur compagnie est contente et ils peuvent conserver leurs congés payés. En hiver, la moitié du personnel a le nez qui coule, tousse, ou porte un masque chirurgical. Parce que personne ne va se reposer du moment qu’ils tiennent debout. Pas très sain tout ça.

Il y a beaucoup de sociétés qui empêchent carrément leurs employés de prendre des congés toute l’année (ou alors tous en même temps, à quelques périodes de l’annnée). Je pense que la plupart de ces sociétés autorisent quand même leurs employés à prendre des congés payés en cas de maladie. Je suppose que c’est un progrès par rapport à ce qui se faisait avant… il y a 100 ans.

Il y a des sociétés qui ont des congés maladie, que vous ne pouvez obtenir que sur présentation d’un certificat médical. Quand on sait que les médecins au Japon ne donnent jamais de certificat médicaux (par peur des responsabilités que ça implique), ça fait une belle jambe aux employés. Un médecin ne donnera jamais un certificat médical pour une grippe par exemple, même si vous en avez une qu’il a testé positivement avec un swab du nez par exemple. Dans les rares cas où le médecin délivre un certif, il vous prendra 40 euros au passage, non remboursés bien sûr. Le cas difficilement parable pour eux est quand vous vous faites hospitalisé. Là, globalement, à moins qu’il s’agisse d’une opération de confort (genre chirurgie esthétique), vous aurez votre certif.

Pour ces sociétés qui autorisent les congés maladie, c’est souvent sans paie. Vous avez alors la possibilité de ne pas aller au travail pour maladie, ils pomperont votre salaire et vos bonus. Puisqu’il faut un certif de toute façon, et que c’est souvent mal vu par vos collègues, votre boss, et les RH, au final personne ne les utilise, sauf quand ils ont un gros truc (genre renversé par un camion, tous les os du corps en bouille). Ils perdent leur salaire, mais au moins ils ne perdent pas leur boulot. Il y a une limite dans le temps quand même, genre si vous êtes pas guéri en moins de trois mois par exemple, vous êtes virés.

C’est légal pour une boite de virer quelqu’un qui ne vient pas travailler pour raison de santé. Le gars touchera le chômage pendant un an (maximum), puis plus rien (RMI, RSA, tout ça, ça n’existe pas à ma connaissance). Le pays ne vous donnera pratiquement rien si vous vous explosez la gueule en moto et mettez du temps à guérir.

Tout cela pour dire que les congés maladie au Japon, il y a beaucoup de cas de figure, mais en gros les boites font ce qu’elles veulent, et en général c’est pas super sympa pour les employés (comparé à ce que la France offre de par sa législation, mais c’est sûrement pas pire que ce qui se passe dans beaucoup de pays dans le monde).

Notez bien que les Japonais trouvent ça parfaitement normal, et que donc c’est pas près de changer à grande échelle. J’en parlais avec un collègue, qu’en occident, il suffit parfois de passer un coup de fil le matin pour dire qu’on est malade et qu’on ira pas travailler et voilà! Parce que bon, les gens tombent malade, pas tout le monde, mais il y en a. Faire une législation qui considère que personne ne tombe jamais malade, ben c’est con et pas très réaliste. Réponse du collègue: “Mais ya des gens qui vont gruger, on peut pas leur laisser cette opportunité.”. Vous voyez le niveau du lavage de cerveau local. Pourtant, j’aime bien ce collègue et il est pas particulièrement bête (il est même tout le contraire de bête), mais voyez-vous, c’est là tout le pouvoir d’un lavage de cerveau. Pas de cocorico nécessaire, on a le même genre en France sur d’autres sujets.

Et puis il y a ma boite. Jusqu’à il y a quelques mois, il fallait un certif à la con pour justifier d’une absence pour cause de maladie, et ils pompaient le salaire. Je n’ai jamais utilisé ces congés parce que les toubs ne donnent pas de certif (j’aurais pourtant bien donné quelques jours de paye pour pouvoir me reposer parfois). Je me rappelle d’une certaine infection pulmonaire, où j’ai utilisé le restant de mes congés de l’année (une semaine environ) puis ai dû travaillé de la maison avec fièvre et inconfort permanent pendant deux semaines, j’avais pas été très content. Au moins ma boite autorisait le télétravail, c’est pas tout le monde qui a cette chance.

Et là, miracle, ma boite a instauré une nouvelle règle cette année. Congés maladie autorisés max 30 jours par an, max 5 jours de suite, sans certif à la con. Ils ne ponctionnent même pas le salaire, mais le bonus, au ratio du nombre de jours pas travaillés. Un jour de congé maladie va vous coûter environ 1/225 de votre salaire mensuel.

Alors là, moi, je dis que, je n’ai jamais vu ni entendu de règle sur les congés maladie au Japon aussi sympa que celle-ci. J’ai eu une bronchite + crise d’asthme il y a quelques semaines, et en ai fait usage pour 3 jours. C’est juste pleinement formidable, je suis aux anges. C’est une bonne boite que la mienne!

Mais a priori, je vais sans doute être l’un des seuls à en faire usage. Les RH étaient tout étonnés genre “mais tu sais qu’on va ponctionner sur ton bonus??”.

Les bonnes surprises, c’est pas tout le temps

Notre staff temporaire a posé sa démission. Les bonnes surprises, c’est pas tout le temps. Elle n’aura pas tenu 2 mois. (motif: “j’y comprends vraiment trop rien”)

Je m’étais fait une raison sur sa présence, mais j’avoue, l’annonce de son départ m’a grandement soulagé. Il faut au moins 1 an pour pouvoir se rendre utile chez nous (dans mon équipe), et 2 ans pour bien devenir efficace. L’attente ne m’enchantait guère.

Ma N+1 a donc aussi quitté l’équipe, puisque la condition de son départ dans une autre équipe était que l’on trouve un staff temporaire pour la remplacer. C’est très ironique tout ça; la N+1 veut partir, on pose comme condition de trouver un temporaire, on en trouve une, le départ de la N+1 est confirmé, et la temporaire pose sa démission!

Accessoirement, chez nous, quand on a un budget pour un employé (permanent ou temporaire), le budget est lié à la personne en question. Quand la personne arrête, on perd le budget de son rôle. Donc quand quelqu’un arrête, on peut pas le remplacer. Les budgets pour embaucher sont très rares, celui qu’on avait eu pour la temporaire il y a deux mois était un peu exceptionnel, donc a priori, on peut faire une croix pour son remplacement.

On était 12 dans mon équipe il y a 3 ans. On était 6 il y a 5 mois. On sera 3 à partir de fin juillet.

Pour le nombre de projets, on en avait une centaine d’actifs à tous moments il y a 3 ans. Ça oscille entre 100 et 150 aujourd’hui. Il y a 3 ans, je trouvais que j’avais beaucoup de temps libre au travail, ça nous permettait de faire un bon suivi client entre autres choses. Aujourd’hui, ça commence à devenir dur. Le temps que j’accorde à chaque projet a évidemment bien diminué.

Le problème n’est pas vraiment le nombre d’heures supp car on n’en fait pas outre-mesure. Le problème est dans la complexité du travail. Les trois dernières années ont été rudes dans le changement des process, ça devient juste impossible de suivre tous les changements. Si en plus on nous mettait une grosse pression en interne, je n’ose pas imaginer les résultats… tu m’étonnes qu’il y ait eu des vagues de suicides dans quelques grosses boites en France.

Pertes de temps

Nos projets doivent être complétés à une date qu’on appelle DDNC: Date Dūe Négociée avec le Client. Le nom est traître, puisque le client n’a pas son mot à dire et en est même informé après coup. Le DDNC est (par exemple) le 4 Septembre 2014, c’est nous qui décidons, point.

Elle est facile à calculer, elle consiste en la date de livraison standarde donnée par le cablo-opérateur + 2 semaines pour tout le reste. Evidemment, ça ne veut pas dire que tout le travail en dehors de la ligne WAN est fait en 2 semaines, puisque qu’on le fait en parallèle du travail fait pour la ligne WAN. C’est juste qu’on a deux semaines standard pour installer le routeur et faire toute les config/tests.

Ratez le DDNC, et c’est la ca-tas-tro-phe. Ça monte trois crans au-dessus de moi (senior Director), et ça redescend aussi vite sur votre gueule via le téléphone.

Quand on rate le DDNC, il faut “coder” le projet avec un code retard. La liste des codes est longue, mais ce qui est vraiment important au final est de savoir de qui est la faute: notre boite, ou le client.

On a le management qui regarde chaque semaine un rapport qui liste tous les projets de la planète qui ont dépasssé le DDNC, avec leur code. On a une target de 0% pour les DDNC dépassées avec notre boite comme responsable du retard.

Pour résumer:
Règle numéro 1: ne pas rater la DDNC
Règle numéro 2: si on la dépasse, il ne faut pas que ce soit de notre faute

Bien sûr, les disputes de responsabilités sont nombreuses, mais heureusement ma division n’est pas trop impliquée; une fois qu’on a codé le projet, les  commerciaux ne peuvent que faire appel au high management pour contester, pas à nous.

Tout va globalement bien jusqu’à ce qu’un jour un directeur décide que les DDNC sont trop longues. “Quoi? 89 jours pour un site en Ethernet au Japon? Non, c’est abusé, on va la mettre à 74 jours.”. Sur quoi s’est-il basé pour prendre cette décision, mystère. Il devait sans doute regarder un rapport sur le temps de complétion des projets, et il voulait l’améliorer. (accesssoirement, la division qui est en charge de surveiller les stats de temps de livraison des circuits par les cablo-opérateurs et de négocier avec eux a hurlé quand elle a été mise au courant après coup.)

La règle “DDNC = temps de livraison du circuit par le cablo-opérateur + 2 semaines”: passée aux oubliettes. Mais du coup, on n’a plus aucune chance de livrer dans les temps. Et ça, c’est inacceptacle pour le management.

Il y avait un process qui existait et qu’on utilisait rarement: le DCE (Date de Complétion Etendue). Le DCE était utilisé quand un opérateur livrait son circuit en retard. On utilisait le process du DCE dans 5% des projets. Il s’agissait concretement de lancer une requête d’extension du DDNC au management (avec détails), qui transférait à un manager régional en charge du DCE, qui allait dans les systêmes changer une date DDNC-bis. Un projet qui dépasse le DDNC mais ne dépasse pas le DDNC-bis n’est pas compté comme un échec dans nos stats.

Temps total perdu par requête DCE: 20 minutes. Pas énorme, mais multipliez par quelques milliers de projets annuellement, et on arrive à des mois/années de temps de travail perdu (étalé sur plusieurs chefs de projet). Parce que maintenant, un bon pourcentage des projets suivent le process DCE.

Et tout ça pour quoi? Pour qu’un directeur A soit content de voir que tous nos projets sont “livrés en heure”. Pour qu’un directeur B soit satisfait d’avoir “écourté” nos temps de complétion des projets.

Nous, le temps que ça nous prend pour finir un projet n’a pas changé. Rien n’a changé pour le client. Rien n’a changé pour le cablo-opérateur. On perd 10 minutes par projet, le management aussi. On perd un temps de travail affolant sur l’année.

Faites ce genre de changement de process 3 ou 4 fois par an. Insérer de nouveaux directeurs dans le management qui auront chacun leur vision de quel rapport est important et quel rapport ne l’est pas, et qui ajouteront des nouvelles règles selon le temps qu’il fait. A la fin, on prend 10 fois plus de temps qu’il n’en faut pour boucler un projet, avec aucune valeur ajoutée pour qui que ce soit. Ça devient terriblement difficile de se motiver parfois.

Nouvelle collègue

On a un nouveau membre dans mon équipe. La cinquantaine, intérimaire, n’a jamais fait d’informatique (elle ne sait pas ce que c’est qu’une adresse IP)… pas facile de la former pour devenir chef de projet dans les réseaux WAN. Perso, je prie pour qu’elle quitte ce job le plus vite possible, mais on va pas lui mettre de bâtons dans les roues. Les bonnes surprises, ça existe. Des gens qui d’un coup se mettent à travailler beaucoup pour x raison, et qui arrivent à passer outre le gap de leur ignorance pour réussir à faire un bon boulot. Ça arrive souvent au Japon. Je dois bien dire que beaucoup de Japonais sont très flexibles, genre ils commencent un boulot pour lequel ils n’ont aucune formation ou connaissance, et au bout de quelques années, ils font un bon boulot.

Ça commence dès la sortie de l’université. Seule une infime partie de mes collègues sort d’une université scientifique, et encore moins d’informatique; 10% peut-être? J’ai vu des experts Cisco qui quelques années auparavant sortaient d’une fac de littérature anglaise…

Après, il faut bien dire que les nouveaux diplômés Français ne savent rien faire de plus que les nouveaux diplômés Japonais. Ce n’est que mon expérience personnelle et c’est très empirique/subjectif, mais grosso-modo, par exemple dans une boite d’info, un diplômé d’informatique Français ne sera pas meilleur qu’un Japonais diplômé de civilisation espagnole. Oh, il donnera plus le change au début, ce sera plus facile de parler de trucs techniques avec le Français et il comprendra mieux nos blagues, mais après un ou deux ans, il n’y aura plus de différence (sauf au niveau des blagues, mais bon, les Japonais et l’humour Français, c’est comme le sucré-salé en cuisine). Le Japonais va s’adapter et bucher comme un fou pour rattraper son retard et aller plus loin la plupart du temps.

A 50 ans, beaucoup de Japonais sont toujours prêts à se réorienter et apprendre de nouveaux trucs. Le truc bien pour eux, c’est que beaucoup d’entreprises sont prêtes à leur donner leur chance. Et ça marche souvent bien…

(Ai-je besoin d’écrire que les contre-exemples de tout ce que je viens de raconter sont nombreux?)

N’empêche que ma collègue de 50 berges là, qui doit se coltiner sa formation? Moi et mes collègues. Et c’est du lourd. Encore, les trucs bien spécifiques à notre secteur, genre expliquer ce que font les cablo-opérateurs, le cablage des immeubles, les astuces et nuances des différents types de ligne et options de service, etc., ça va, c’est amusant et motivant même pour moi de l’expliquer.

De devoir expliquer que non, tout ne tourne pas tout seul et que chaque merde qui arrive dans le projet peut nous être reprochée à nous (et non pas au connard à l’autre bout de la planète qui a fait la boulette). Que oui, des merdes arrivent tous les jours, c’est un peu ça notre boulot: fossoyeur de merde, on gère les emmerdes quoi! Et il en arrivent de toutes sortes, des gens pas motivés en face, des trucs qu’on sait pas encore qui a merdé ni comment réparer, des systèmes qui délirent, des gens en vacances, des clients irrascibles qui n’ont pour but dans le vie que de rendre la nôtre misérable, etc. Un classsique dans ce secteur d’activités, c’est les telecoms quoi! Mais pour quelqu’un qui n’y a jamais travaillé, c’est comme si elle avait imaginé le pays des bisounours et qu’elle se retrouve avec une bande de hobbits au pays de Sauron.

Son premier projet, une implémentation d’un site à Singapour, deux routeurs, deux lignes. Le gars en charge de la commande des lignes au cablo-opérateur qui la contacte pour lui demander si les lignes sont en path-diversity, c’est à dire si le cablo opérateur doit utiliser deux lignes physiquement distinctes à partir du rack du client jusqu’au centre telecom (le but étant d’avoir le service continuer si il arrivait un accident à l’une des lignes). Après vérification sur le devis, oui, il faut du path-diversity. Alors elle lui a répondu que oui, le devis avait d’ailleurs été pris en ce sens.

Réponse du gars des commandes: ouais mais non, l’opérateur dit que c’est pas possible qu’il ait fait un devis pour ça à ce prix. Il demande aussi de vérifier que le commercial a bien pris un devis pour du path-diversity.

Alors là, perdue notre petite nouvelle:
Mais, je lui ai dit hier que j’avais regardé le devis…
Mais, pourquoi l’opérateur dirait qu’il n’a pas donné ce prix…
Mais, comment on va faire…

Réponse: j’en sais rien du tout, mais comme on peut pas parler avec l’opérateur en direct, contentes-toi de répondre à la question. “Oui, le devis est pour du path-diversity, en voici la preuve”. Et on va attendre la réponse. Si le gars des commandes et l’opérateur ne donnent aucune piste quant à ce qui a bien pu se passer, on contactera le gars qui a fait le devis pour le confirmer.

Alors c’est normal que notre petite nouvelle ne sache pas tout ça et on ne lui en veut pas, mais ça n’enlève rien au fait que ça soit ultra-gonflant pour nous. En fait, on perdrait moins de temps à faire tout le travail nous-mêmes, mais dans deux ans, si elle devient opérationelle, alors à ce moment on y gagnera beaucoup plus de temps que si on avait continué à faire le job nous-même. Une sorte de placement sur l’avenir en fait.

La proposition

Mon ancienne boss de ma boite actuelle, qui est devenue boss d’une autre équipe, me contacte pour me dire qu’il va bientôt y avoir une embauche dans son équipe, et me demande si ça m’intéresse. En dehors du langage PR minimum pour me vendre le truc, elle précise que ce sera une place à l’échelon xx, donc un boost dans le salaire.

Hum. Je suis déjà à l’échelon xx, toujours été depuis que cette boite m’a embauché il y a presque 8 ans.

Et l’équipe qu’elle dirige, au Japon, est constituée de 5 membres à Tokyo. Une des membres, je l’aime bien mais elle n’est jamais là puisqu’on l’a vendue à un client pour des années, un des membres m’est indifférent parce que sa présence est complètement évanescente au mieux, et les 3 autres membres doivent être les 3 personnes que j’apprécie le moins dans la centaine d’employées au Japon.

Pas une équipe de rêve pour moi donc. Il se trouve que toute la boite ne peut pas trop encadrer cette équipe parce qu’ils ont beaucoup de problèmes avec eux (ils ont une étiquette de gros salaires doublés de gros feignants. Surtout de gros feignants d’ailleurs, puisque gagner beaucoup n’est pas un problème en soi, du moment qu’on assume la masse de travail pour laquelle on est payé).

Je m’entends bien avec les collègues dans l’équipe où je suis actuellement. Mon salaire est déjà bien. Je bosse pas comme un malade, sauf parfois, selon les projets en cours. Je connais le boulot à faire et les outils utilisés donc je me casse pas trop la tête sur des conneries administratives, je suis pas à la ramasse, quoi!

Alors là, je vois pas bien pourquoi j’irais dans cette équipe que je peux pas voir, que tout le monde critique, pour faire un boulot où je vais devoir travailler à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, où je vais devoir converser bien plus souvent avec les clients (irrascibles pour certains bien sûr), et où je vais devoir me casser la tête et les dents sur des nouveaux outils. Sauf si on me paye un smic en plus, bien sûr (ahah). Je plaisante, ma loyauté est bien plus flexible; une moitié ou même un tiers de smic me ferait réfléchir sérieusement. Après tout, il va bien falloir payer les écoles des enfants d’une façon ou d’une autre, et je suis pas là pour me rouler les pouces mais pour toucher un virement bancaire le plus gros possible à la fin du mois. Ça fait un peu pute, hein.

Alors j’ai répondu à mon ancienne chef: ouah génial c’est vrai que ça élargirait beaucoup mon domaine de compétence avec tout plein de challenges, mais je ne me vois pas faire le saut sans une grosse motivation financière. D’ailleurs, je suis déjà à l’échelon xx, donc voilà, je crois que ça va être difficile.

Sa réponse: je suis ravie de voir que tu es intéressé, je m’en rappelerai bien quand le job sera ouvert.

Bon. C’était pas l’effet escompté.

J’imagine que quand le job sera ouvert, on me le proposera sans compensation financière, et je refuserai en racontant je sais pas quoi, mais sans mettre trop en avant que ça génère pas assez de $$$, histoire de pas trop passer pour le vénal de service. Inutile de dire que c’est aussi beaucoup parce que j’aime pas l’équipe, parce que c’est trop négatif et que là ils vont m’en vouloir.

Notes de frais

Comment faire des notes de frais au bureau.

  • Les rentrer dans une application de la compta (classique).
  • Imprimer un rapport dégurgité par l’appli (ah, l’appli ne suffit donc pas?).
  • Coller les reçus sur une feuille blanche (classique).
  • Scanner le rapport et les reçus (tout est déjà dans le système de la compta, mais bon!)
  • Faxer le scan du rapport et des reçus à la compta (là franchement je comprends vraiment plus).
  • Mettre le rapport imprimé et les reçus dans une chemise transparente, et les donner… à la compta!

La compta a donc besoin des données dans leur système, de ces données par fax, et des données sur papier.

La cerise sur le gateau, c’est que la compta nous demande expressément de bien garder une copie du rapport imprimé et des reçus, parce qu’elle perd nos notes de frais assez souvent.

Je creuse

C’est officiel, je suis maintenant resté plus longtemps dans ma boite actuelle que dans ma précédente. Stable vous avez dit? Oui, c’est moi. Enfin, c’est mon troisième prénom.

Vais-je y rester jusqu’à ma retraite? Personnellement il y a quelques boites que j’aimerais bien essayer, mais je ne suis pas contre l’idée de rester ici toute ma vie non plus (et hélas, il faudrait que ces boites soient intéressées par moi pour que je puisse y aller). C’est un peu minant quelque part, on se sent un peu pris au piège avec un pied dans la tombe, mais il y a des avantages faramineux ici, difficilement trouvables ailleurs au Japon.

Budgets de grosses compagnies

La semaine dernière était la “Customer Service Week”, c’est à la dire la “semaine” de ma division. Ma division est la “Service Delivery”, qui fait partie de la plus grande division “Customer Service”. Et cette semaine, c’était LA semaine  où il y avait “plein” de choses. C’est à dire un speech quotiden d’un gros ponte (par email) sur une des maximes de notre division (genre “show them we care” ou “do it faster and better than others” ou “take ownership”), et l’obligation de faire une fête entre collègues et d’envoyer des photos plein de joie au QG, pour que celui-ci mette toutes les photos en ligne pour bien montrer comme on prend du bon temps dans ma division, et comme l’ambiance est excellente. La photo ci-dessous est l’une des photos prises pour le Japon. Le budget pour la fête? 3000 JPY (30 €). Pas 3000 JPY par personne, non non, 3000 JPY total. Pour 15 personnes donc. Ça fait donc 200 JPY (2 €) par personne pour s’amuser, dans l’une des villes les plus chères du monde. 2 €, ça fait un coca et un mini-sneaker. Pas un sneaker entier, hein, faut pas déconner. C’est le coca OU le sneaker entier, il faut choisir. On n’est pas chez Crésus ici.

Bon, le collègue nommé pour tout organiser a trouvé des trucs pas chers. On a pris les photos, on s’est répartis les petits gateaux et bonbons, et la “fête” était finie en 15 minutes pour qu’on aille prendre notre lunch. N’allez surtout pas croire que je critique le petit budget qu’on a reçu, puisque d’habitude, c’est de note poche. Les fêtes de fin d’année, les pots de départ ou d’arrivée dans la boite, etc., tout est payé par nous-mêmes. Alors 3000 JPY, c’est Byzance.

Test de japonais

Un recruteur m’a présenté à une boite (je sais pas ce qui se passe, il y en a plein qui me contactent cette année, et pourtant je n’ai rien fait pour les attirer), et la boite a manifesté le désir de me rencontrer. Mais avant ça, ils ont tenu à avoir un entretien téléphonique de “10-15 minutes” pour vérifier mon niveau en japonais.

Appel de la dame des RH. Salutations. Elle me demande d’entrée pourquoi je suis intéressé par un job dans leur boite. Je réponds en une phrase. Elle étouffe un gloussement, et me dit:

– Ça fait longtemps que vous êtes au Japon?

– 12 ans

-Wow. Et je suppose que vous avez déjà travaillé en japonais?

J’avoue, je suis toujours étonné qu’on me pose cette question. Je réponds:

– Je n’ai toujours travaillé qu’en japonais.

– D’accord… Alors quel est votre titre de séjour?

– J’ai le statut de résident permanent.

– Oh! Et vous êtes marié, bien installé, etc?

– Oui, marié avec une japonaise, deux enfants…

– Bon d’accord. On a plein de candidats qui nous disent qu’ils savent parler japonais, mais rendus à l’entretien on s’aperçoit qu’ils ne sont pas aussi bons qu’ils l’ont laissé entendre, c’est pourquoi on a décidé récemment de faire ce pré-test pour éviter de perdre du temps dans les entretiens.

– Ah.

– Mais là vraiment, on peut arrêter tout de suite. Je transmets à mon chef et on vous contacte pour fixer un rendez-vous.

Ça a duré moins de trois minutes. Je n’ai pas parlé beaucoup, hein.

Il y a donc bien des gens qui mentent/exagèrent sur leur niveau pour arriver à l’entretien. Et il y en a assez pour que des boites s’énervent et décident de tester les candidats par téléphone d’abord. Ils sont bêtes ces candidats ou quoi?