Entretien

Un entretien important, pour un job qui me plait vraiment.

Pour résumer j’ai été nul. J’ai pas bien géré la pression (de trouver un job, un super job pour une super boite), je me suis mal exprimé et j’ai oublié de dire plein de trucs. En face: des gens très bien, qui ont dû me prendre pour un bouffon. Les Japonais ont plus de tact que les occidentaux, ils sont restés gentils.

Arrivés aux prétentions salariales, je donne mon salaire actuel, enrobé avec le coût de mon appart et du billet de train mensuel que me paye ma boite. Là la fille des RH intervient: “euh le budget pour ce poste est xxx” (15% de moins) “Quel est le minimum que vous souhaitez?”

Moi: Je viens de vous le dire, lol. Bon allez, on peut enlever un peu pour l’appart que JE paye et que je n’aurais pas besoin de payer si je vais chez vous… allez disons xxx (8% de moins que mon chiffre initial)

La fille des RH interloquée deux secondes genre “c’est toujours au-dessus du budget”.

Je veux ce job à mort, mais je suis pas une pute. Mon salaire est plus important que la mort. (en fait à 8% de moins on est toujours au-dessus du salaire que je touche actuellement, lol)

On y va au culot, hein. Perdu pour perdu. Si ils me veulent, ils débourseront… il y a toujours un moyen de trouver de l’argent supplémentaire.

Mais globalement, vu ma prestation, je crois n’avoir aucune chance. Vite vite le prochain entretien. Je suis dans mon 4e mois de recherche et ça devient chaud chaud. Etranger au Japon, près de 50 ans… on y croit. Beaucoup de (grosses) boites mettent les plus de 55 ans en simili-pré-retraite à faire un job fantôme pour un salaire diminué, alors investir sur un gars de 50 ans… bof bof.

Les blancs

Aaalors visite chez mon psy, résultats de la prise de sang de la dernière fois.

Il me fait faire une prise de sang tous les trois mois puisque le lithium a tendance à s’accumuler dans le foie et devient un poison.

Résultat: no problemo. Sauf que. L’examen sanguin avait relevé d’autres valeurs, et le taux de globules blancs était élevé.

Moi: Ah bon, ok. (rien à foutre)

Lui: nan nan nan. Ce taux n’est absolument pas bénin. Il y a quelque chose de potentiellement grave. C’est aussi potentiellement pas grave, mais allez vous faire voir par un médecin.

Le test sanguin a été fait il y a 3 semaines… si c’est grave j’aurais apprécié un coup de fil, hein. Et là il était samedi 18h, ma visite chez le toubs remise à lundi.

Lundi, je vais voir le toubs que j’avais trouvé la dernière fois. Je lui montre les résultats de l’analyse.

Lui: Ah pas mal. Vous êtes fatigué? Vous avez eu des symptômes grippaux ou autre?

Moi: non, rien. Même pas de fièvre.

Lui: Umh. Alors qu’est-ce qui génère un tel taux sans symptômes… Je penche pour une leucémie!

Et il me donne plein de détails sur ce dont une leucémie s’agit. Mais le test datait d’il y a 3 semaines, alors faisons des tests plus poussés.

Une infirmière me prend cinq tubes de sang (d’habitude c’est deux), je patiente 5 minutes et déjà les premiers résultats. 5 minutes pour avoir des chiffres… impressionnant.

Lui: Alors la bonne nouvelle, c’est que le taux de globules blancs a baissé de 20%. On est toujours haut, mais apparemment ce qui a causé cette hausse est probablement en train de se résorber tout seul, voire même ça a peut-être déjà disparu puisqu’il y a un délai entre la fin d’une maladie et la baisse du taux de globules blancs.

Moi: ok

Lui: l’autre bonne nouvelle c’est que vous n’avez pas de leucémie. Si vous aviez une leucémie, le taux ne baisserait pas tout seul comme ça.

Moi: ok

Lui: Ce qui m’ennuie un peu, c’est cette valeur.

CRP: 0.0mg/dL

Lui: C’est votre taux d’infection. Il est à zéro, donc… c’est pas viral. Et donc en l’état des choses je n’ai aucune idée ni hypothèse de ce que ça peut bien être. On va faire des tests en labo, revenez dans une semaine…

Pendant le week-end je me disais que j’allais encore avoir un traitement médicamenteux… mais probablement non. Qu’est-ce que j’ai bien pu avoir.

La honte

Moi à table, Ryu dans la cuisine. Je lui demande de m’amener mon verre.

Moi – le verre qui est sur le comptoir en face de toi

Ryu – hum?

Moi – le verre pokemon, là

Ryu – hum?

Moi – celui qui est juste en face de toi.

Ryu – Ah, le verre Yokai watch?

Moi – …

Et voilà. A près de 50 ans, je suis devenu inculte. Je n’ai pas su faire la différence entre pokemon et yokai watch, deux œuvres absolument gigantesques.

Je pouvais bien me foutre de la gueule de yoda l’autre jour.

Une bonne action

C’est l’anniversaire du dragon et donc Akira va forcement être de mauvaise humeur, bavant devant les cadeaux de son frère.

Alors je lui ai envoyé un message: “tu veux quelque chose?”

Il m’a renvoyé une liste de 10 jeux vidéo… J’en ai choisi un qui me semblait être le meilleur, et c’était peut-être aussi le plus cher… qu’et-ce que ça coûte cher les jeux-vidéo!

Et Akira de m’envoyer un message: “il faut pas le dire à maman, hein! Elle veut que je travaille tout le temps, elle va pas arrêter de m’engueuler si elle est au courant.”

Hum. eheheh.

Oui Akira, nous n’allons pas le dire à ta mère, on va tous les 3 s’en porter bien mieux, et on va tous les trois s’en porter bien mieux pour trois raisons différentes.

Oda

Oda est un nom de famille très noble au Japon. Quand on prononce le nom de Oda, tous les Japonais pensent à Oda Nobunaga, grand seigneur de guerre du 16e siècle (même si ce n’est pas par la guerre qu’on devient grand, comme disait… qui ça déjà?)

Il y a 20 ans dans ma première boite où j’étais admin système, on construisait les adresses mails par la première lettre du prénom suivi du nom de famille. Pour quelqu’un s’appelant Daniel Martin ça donnerait [email protected]. Beaucoup de boites font de même.

Ce jour-là une nouvelle recrue arrivait, une jolie jeune fille dont le nom de famille était Oda, et j’allais à son bureau pour mettre son PC et réglages d’équerre. J’en arrive à son adresse email et lui demande son prénom.

Yumi. (rien à voir avec la Yumi d’il y a 2 articles)

Son adresse donnait donc [email protected]

J’étais mort de rire. D’un côté c’était une adresse super cool, mais de l’autre comparer la belle demoiselle au petit bonhomme vert c’était très drôle.

Et elle vexée de me voir rire en continu, “mais qu’est-ce qu’il y a de drôle??”.

Tu connais pas Yoda? -Non

Tu connais pas Star Wars? -De nom mais j’ai jamais regardé.

Inculte. J’ai ignoré son agacement, elle pouvait bien aller se faire foutre pour ce que j’en avais à faire. Mais hey, je me rappelle toujours d’elle aujourd’hui, et même de son visage. La mémoire est bizarrement faite.

Mayu

Mayu a 27 ans. Normalement on ne devrait rien avoir à se dire mais là nous sommes d’un côté et de l’autre d’un comptoir, moi assis, moi payant les boissons devant nous.

Je parlais de l’anniversaire du dragon, qui avait le même âge que le frère de Mayu. Mayu avait un frère et deux sœurs. Famille nombreuse, intéressant.

Et Mayu rajoute, je ne sais pas du tout pourquoi, “mais pas des mêmes parents.”. Oh, encore plus intéressant. Creusons.

La mère de Mayu lui a donné naissance un peu avant 17 ans, soit en 2e année de lycée. Puis elle l’a abandonnée à son père 2 ans plus tard. Son père s’est recasé et a fait 3 autres enfants.

Parenthese: en japonais le mot est différent selon que son demi-frère (ou demi-sœur) est de père différent (種違い) ou de mère différente (腹違い). Par contre le mot est le même qu’il s’agisse d’un frère ou d’une sœur. C’est similaire au mot “sibling” en anglais, qui se traduit en français par “enfant de mêmes parents”. Existe pas en français, il faut une phrase pour le traduire.

A-t’elle revu sa mère?

Jusqu’à sa majorité son père la rabrouait quand elle en parlait. “Tu ne reverras pas ta mère, et ça vaut bien mieux.”

A sa majorité ça a un peu évolué; il a accepté de la présenter à sa grand-mère maternelle. Celle-ci, très gentille apparemment, lui a dit de ne pas chercher à retrouver sa mère, que c’était pas une personne bien, et qu’il valait mieux ne jamais la rencontrer. Accessoirement sa mère s’était -selon sa grand-mère- mis avec un étranger et était partie à l’étranger. Loin. “Je sais où elle est mais je ne te le dirai pas.”.

Retour au présent. Mayu me demande “Tu crois que je devrais pas la revoir?”.

Ben si tous ceux qui la connaissent disent qu’il vaut mieux pas la rencontrer, il y a de bonnes chances qu’il ne vaille mieux pas la rencontrer, oui…

Evidemment c’est pas moi, un inconnu, qui vais la convaincre, et d’ailleurs ce n’est pas ce que j’essayais de faire; on m’a posé une question demandant mon avis j’y ai répondu c’est tout. J’ai essayé l’écoute active pour qu’elle résolve elle-même son dilemme, mais je crois pas que ça ait fonctionné.

Je ne sais et ne saurai pas ce qu’il va advenir de cette histoire. Je sens beaucoup de souffrances à venir, que Mayu rencontre sa mère ou pas. Je l’aiderais bien mais elle ne voudra jamais de mon aide. Trop personnel.

Bon courage et bonne chance.

 

 

Yumi

En 2e année de DESS, à Tokyo, moi et mon pote Mathias étions allés dans un bar.

A côté de nous, deux filles dans nos âges. Les gars chassant les filles, les filles chassant les gars (l’histoire de l’humanité), on n’a pas mis longtemps à discuter à 4.

L’une très mignonne mais dont je ne me rappelle plus le nom, et l’autre: Yumi.

Yumi était la plus belle Japonaise que j’avais rencontrée jusqu’alors. A ce jour, elle l’est toujours, mais je l’ai peut-être un peu idéalisée. Le temps fait son affaire.

En fait elle était même sans doute la plus belle fille que j’aie rencontrée de ma vie. Et puis c’est même toujours le cas aujourd’hui, allons-y n’ayons pas peur des mots. Elle avait un visage magnifique, un corps parfait, un sens vestimentaire formidable, une façon de parler et une pudeur très mystifiantes. Elle était parfaite. Presque mon idéal. J’étais fou d’elle mais je la voyais intouchable pour moi.

On a gardé le contact, on s’est revus avec quelques-uns de ses amis, dont son petit-copain, un connard incroyable qui l’ignorait et lui parlait mal. J’étais outré.

Jour J.

Apres une journée de travail pas facile, je me prend une heure de train debout pour rentrer dans ma banlieue, je franchis le pas de ma porte et ressens une fatigue énorme, quand le téléphone sonne. C’était Yumi, et elle m’invitait à un bar à Shinjuku. Plus d’une heure de train dans l’autre sens, quoi. Je me suis excusé “Je suis mort, je viens de rentrer après une heure de train, on peut remettre ça à un autre jour? Oui? Merci, bye”.

Jour J + 14 jours

J’entame une relation avec Yukiko, qui allait devenir ma femme.

Jour J + 30 jours

Soirée restau avec des amis, communs à Yumi. Pendant la soirée on parle de Yumi, et de son copain, et les amis me disent “Ah non ils ont rompus il y a un peu plus d’un mois.”

Moi dans ma tête: “hein?? Mais alors ça veut dire que…”

Naaan.

Naaaaaaan.

Naaaaaaaaaaaaaaan!!!

J’avais Yukiko à côté, je pouvais rien laisser transparaître mais… j’ai plus pu parler pendant quelques minutes. J’ai dû devenir blanc lait, j’ai eu mon cœur qui a fait des bonds, j’ai eu des sueurs froides. J’ai vécu un cauchemar en n’ayant pas le droit de le montrer.

Ça allait très bien avec Yukiko qui était elle-même un sacré brin de fille donc je ne me suis même pas posé la question de la larguer pour courir vers Yumi (en y repensant ça ne m’a pas du tout traversé l’esprit). J’ai tout de suite su que la fenêtre était passée et que je l’avais tout simplement man-quéeeee.

Hey, j’ai fait un mariage qui a tenu 20 ans, deux enfants formidables, j’ai rien perdu. Est-il possible de penser.

Toutes les naissances ne sont pas belles. La naissance d’un démon est une horreur. Tu sais que tu vas morfler des années en la revivant encore et encore et tu ne peux rien faire pour régler la situation parce que bah c’est fini et enterré. C’est comme si tu voulais ranimer un mort qui est mort depuis un mois. Va guérir de la mort, toi.

Et c’est donc depuis ce jour que je ne refuse plus d’invitation. Je l’ai déjà écrit, mais on t’invite, tu y vas, au pire tu t’ennuies quelques heures, fin de l’histoire et c’est pas grave. Mais ce qui peut potentiellement arriver de positif tu n’en as pas forcément l’idée ou la conscience avant d’y aller.

 

Rétrospective de ma scolarité (partie 6 – dernière partie)

DESS

Je voulais aller au Japon. Ce DESS y menait apparemment et un bac +5 était un bonus (qui n’aura finalement servi à rien sauf à me vanter à l’occasion d’avoir deux masters).

J’ai beaucoup stressé pour le concours d’entrée un peu pour rien car ça ne se pressait pas beaucoup aux portes, j’avais déjà été au Japon et avait étudié le japonais en autodidacte ce qui prouvait une grosse motivation. Je m’étais aussi beaucoup documenté sur le Japon depuis ma deuxième 1ere. J’ai été accepté sans trop de difficultés (comme l’écrasante majorité de mes futurs camarades).

Parenthèse: Du jour du concours (la veille en fait) j’ai perdu mon sentiment de béatitude de la maîtrise, et ne l’ai depuis jamais retrouvé. Bah, ça pouvait pas continuer ad vitam eternam.

La première année du DESS se passa extrêmement bien. On était… 18 je crois? Enfin 19 au départ avec un abandon quelques semaines plus tard. Rapidement un noyau dur se forma avec moi et 3 autres potes, mais rapidement 2 gros groupes se formèrent. Dans l’autre groupe il y en avait deux qui étaient un peu space et il se retrouvèrent donc rapidement à être un groupe de deux (ça n’avait pas l’air de les gêner le moins du monde, tant mieux pour eux), et tous les autres se parlaient, travaillaient, faisaient la fête, etc. ensemble. (pas toujours tous ensemble, voire pratiquement jamais tous ensemble… ça a dû arriver une ou deux fois seulement).

Le truc qui nous a beaucoup soudé je crois était qu’on venait tous d’une autre ville (le DESS était à Rennes), sauf deux élèves, et qu’on avait tous un intérêt pour le Japon. On est toujours resté entre nous. Mais en dehors de ça, la plupart d’entre nous avions une maîtrise (tatata!) ou un autre bac +4 dans des domaines divers et variés (économie, physique, info, langues, etc). Au moins deux avait un bac +5 scientifique (école d’ingé). C’était vraiment très fun.

Moi j’étais sur la lancée des fêtes non-stop de la maîtrise et… j’étais pas le seul! Et j’étais pas en avance non plus sur mes 2 ou 3 autres nouveaux potes du DESS, ça se sentait qu’ils avaient fait fort aussi.

Bon, les cours… ça dépendait vraiment du prof qui les faisait. Il y en avait des très bien, il y en avait des très nuls. En gros on s’en foutait un peu, nous tout ce qu’on voulait c’était aller au Japon dare-dare. En attendant, il s’agissait de faire la fête, et fêtes nous avons fait à une bonne cadence. Moins qu’en maîtrise, mais pas mal du tout.

A mon immense joie, je me suis fait une copine (Lucile, quoique je sais plus si il y avait un “l” ou deux… attendez, il y a des filles je me rappelle même plus de leur prénom, là ça va encore!) que j’aimais beaucoup (pas quelqu’un du DESS) et ça a été le bonheur… quelques semaines… et puis c’est parti dans une vrille cataclysmique. Elle avait un problème psychiatrique je pense. Je dis pas ça péjorativement. Et comme je suis pas exactement un modèle de stabilité non plus (euphémisme)… ça a fait…pas des étincelles, non… plutôt une explosion thermonucléaire? J’ai mis fin au supplice pour nous deux aussitôt que j’ai compris. J’étais pas heureux d’y mettre fin, voire même très déçu, mais la relation était toxique, et sans doute plus pour elle que pour moi.

Il y a eu un épisode pas cool, qui a signé la fin d’ailleurs… avec toute sa famille participant (mère, père [dont je ne me rappelle plus??], frère, belle-sœur…), moi en train de me dire que ça n’arrive que dans les films des situations pareilles, je nous ai sorti un coup de bluff fabuleux (vraiment un truc impressionnant, le gros menteur professionnel) pour m’en sortir et les laisser gérer entre eux une situation franchement difficile pour les nerfs… Ils étaient vraiment sympas dans sa famille, une belle-famille de rêve. J’étais navré de les abandonner.

Ma cops a été détruite, je sais pas pendant combien de temps mais a priori pas longtemps, lol. Une de ses copines m’a dit quelques mois après que non non, no problemo du tout, donc son “supplice” n’a pas dû durer longtemps, genre quelques jours j’imagine… “détruite”, c’est donc tout relatif. Rien de grave n’est arrivé. De ce que je sais.

Pour la petite histoire lourde, je me rappelle avoir appelé chez sa belle-sœur après un épisode critique pour vérifier qu’elle s’était pas suicidée quand même (ça s’était vraiment mal fini, hein), par acquis de conscience… (où est passée ma conscience d’ailleurs, je ne la retrouve plus, je l’ai égarée quelque part)

(entre parenthèses: ce que je pensais)

Moi: (tu l’as vue?) Lucile est là?

Belle-sœur: Oui, elle veut pas te parler.

Moi: (oui, bah moi non plus) Il n’y a pas de problème, je comprends.

Moi: (elle est toujours vivante donc?) Elle va bien?

Belle-sœur: non.

Moi: (ouais!! elle est vivante, c’est super cool) Ah ouais ouais… euh.. bah… ok bah prenez soin d’elle, merci, bye.

Cet incident n’a bizarrement abîmé en rien ma perception de cette année-là. J’ai été préoccupé quelques jours et puis plus rien. Marrant, hein. C’est juste un coup à prendre en fait, lol. Pour info, je n’ai aucun démon relatif à cette affaire. J’ai passé une année formidable. Bonnes fêtes, bons potes, parler du Japon toute l’année, préparation du voyage… J’ai passé une excellente année.

Deuxième année (au Japon):  L’une des pires années de ma scolarité. Tout est allé de travers. Il y a même eu un mort: ma grand-mère. Bon, il n’y a eu que 5 mois en cours de langue puis c’était le stage en entreprise qui en fait était du travail déguisé.

Il y a eu zéro bonne fête. On s’est réunis quelques fois, au mieux c’était inconséquent. Au pire il y avait de la frite (verbale). Je vais pas aller dans les détails, ce fut immonde, odieux. La part des responsabilités, ouais… Pas facile à déterminer mais j’en ai ma part. Une bonne part. Je serais bien en mal de jeter la pierre à qui que ce soit.

Ce qui est clair pour moi, c’est que comme dans pratiquement tout le reste de ma jeunesse (sauf l’année de maîtrise), j’ai mal géré. J’ai rien vu venir, j’ai jamais désamorcé, j’ai jamais discuté, j’ai jamais négocié, je n’ai eu aucune patience et n’ai pensé qu’à moi. 20 ans après, tout ce qui m’importe est que j’ai été nul. Sur le moment j’estimais être dans mon bon droit (ce qui n’est pas du tout prouvé), mais en ce qui concerne ce que j’ai dit, et bien j’avais tort. Que je sois dans mon bon droit ou pas. Tu ne dis pas des trucs comme ça à des potes, point.

En fait, je repense à l’intégralité de ma scolarité, je repense aux merdes que j’ai eues, ceux qui m’ont fait chier, les profs que j’aimais pas ou qui m’ont fait des crasses etc., et je n’en veux à personne (euh? Comme ça a priori et en y pensant seulement 5 minutes, hein…). Aucun de ces souvenirs ne m’empêchent de dormir. C’est quand moi je n’ai pas fait ce qu’il fallait que ça pince. Tous mes démons viennent de là (et de quelques filles lol). Accessoirement, je réalise que je n’ai pas de démon récent. Ils ont tous plus de 20 ans. Ça doit être le moment où j’ai perdu ma conscience, lol.

J’ai passé de formidables moments. Je ne devrais être que reconnaissant envers la vie de me les avoir donnés. La jeunesse et la scolarité sont des moments tellement difficiles, potentiellement tellement dangereux. C’est terrible de les affronter à cet âge-là, et en même temps c’est justement parce qu’on a cet âge qu’il faut les affronter. Et moi je m’en suis tiré plutôt bien quand on considère ce qui aurait pu arriver. Ouais ouais, je suis pas un cas rare et beaucoup s’en tirent bien. Mais j’ai vu le danger dans les yeux, j’ai vu des élèves s’effondrer ou partir en flammes, j’ai fait face à des murs très hauts, j’ai eu des merdes (qui heureusement se sont résolues sans problème), etc. Perso je m’estime chanceux. Le mérite d’une bonne éducation me revient officiellement (mon diplôme, ma performance.), mais je suis bien conscient que dans le grand ensemble des choses ce n’est pas que le travail/sérieux/assiduité/etc. qui comptent. Pour le reste, et bien ça s’est bien mis pour moi, alors que je n’en avais aucun contrôle, et donc dans les faits aucun mérite pour le résultat. L’univers ne nous doit rien, et tu peux bien faire tous les efforts qu’il faut quand il faut, tu te prends quand même dans la gueule une vie que globalement tu n’as pas choisie. Elle est bien? Tant mieux pour toi. Elle est nulle? Tant pis pour ta gueule.

Ça, c’est le côté objectif.

Pour le subjectif… et bien la scolarité et l’enfance en général, c’est là où le meilleur comme le pire peuvent arriver et me sont effectivement arrivés (c’est mon ressenti, mais je dramatise carrément car en fait y’a bien bien pire que ce que j’ai eu, genre viol, harassement, cassage de gueule, drogue, racket, racisme, etc. Bon, allez, en toute honnêteté il m’est arrivé un truc grave mais je suis pas prêt à en parler). Les meilleurs souvenirs de ma vie sont de cette période, les pires aussi. Et ce sont hélas les pires souvenirs qui reviennent constamment, souvent le soir et le week-end. Si je pouvais oublier l’intégralité de mon enfance/jeunesse, je le ferais. Voilà la conclusion de toute cette période de ma vie: j’aimerais l’effacer.